Ce voyage de cette fin d’année 2022 était l’occasion de retrouver les trains américains. Et plus précisément de marcher dans les pas de mon mentor en matière de photographie ferroviaire, Richard Steinheimer. Mon trajet prévoyait donc de découvrir la boucle de Tehachapi et de retourner à Cajon Pass, déjà visité en 2005.
Un malheureux événement est cependant venu contrarier mes plans. Quelques heures après mon arrivée sur le sol californien, j’étais victime d’un vol. La quasi-totalité de mon matériel (appareil photo, objectifs et ordinateur) a disparu (ainsi que la valise de ma femme). Par miracle, mon sac à dos n’a pas été subtilisé. Il ne restait plus qu’un seul zoom, le Zeiss 24-70, que j’avais déplacé pour des raisons de poids de bagage en cabine de l’avion.
Repartir à zéro et surmonter ses doutes
Vous imaginez bien qu’une telle mésaventure a bouleversé mes plans (ainsi que les projets pour l’année à venir). Elle est survenue à un moment fort de doute concernant ma démarche photo et son utilité. Dans un premier temps, j’avais décidé de tout arrêter. Le matériel envolé était le fruit de plusieurs dizaines d’années d’acquisition, tant les équipements de qualité sont chers. Quel intérêt à dépenser de nouveau pour des résultats et une audience confidentielle ?
Une fois la nouvelle partagée sur les réseaux sociaux, les marques de soutien ont afflué. Plusieurs amis m’ont suggéré d’utiliser un financement participatif afin de me procurer un boîtier et sauver ce séjour. J’ai obtempéré sans trop y croire. À ma grande surprise, le lien s’est propagé et la solidarité a fonctionné. J’ai ainsi pu avoir un apport important pour acheter un Sony A7-3. Ce sont des images faites avec ce dernier que vous pourrez découvrir ici.
Au-delà du soutien pécuniaire, les paroles d’encouragement m’ont montré que mon travail était apprécié et loin d’être anonyme. « Ils ont peut-être pris tout ton matériel, mais ils n’ont pas volé ton talent », m’a confié Angélique. Ces paroles m’ont profondément marqué et expliquent, probablement, pourquoi vous pouvez lire ces lignes.
Je n’aurai jamais assez de mots pour remercier toutes celles et ceux qui ont participé, même de façon symbolique. Cela n’a pas été facile pour moi de demander de l’aide et cette aventure m’aura apporté beaucoup sur un plan personnel et de la connaissance de soi.
Dans les pas de Richard Steinheimer
J’ai donc finalement pris la route. Tehachapi a été une véritable découverte et un grand coup de cœur. Ma femme et moi étions logés au cœur de la boucle, au plus proche de l’action. Le spectacle d’un convoi de plusieurs kilomètres de long qui s’enroule et se déroule autour des différentes collines est hypnotique. La photographie traduit mal ce côté grandiose.
Des éclaircies providentielles sont venues me donner un peu plus d’optimisme et de chaleur. J’ai dû faire avec les restrictions liées à mon seul objectif. J’ai dû dire adieu aux compositions nécessitant une longue focale. Vous constaterez que souvent le train passe au second plan, le premier étant occupé par l’environnement. En soi, ce n’a pas été vraiment un problème puisque je souhaitais mettre en avant les paysages modelés par le chemin de fer.
Vous constaterez que souvent le train passe au second plan, le premier étant occupé par l’environnement. En soi, ce n’a pas été vraiment un problème puisque je souhaitais mettre en avant les paysages modelés par le chemin de fer.
Je suis retourné à Cajon Pass après un hiatus de dix-sept années. Mes souvenirs étaient plutôt positifs. Mais rapidement, je me suis rendu compte de l’intensité du trafic routier dans le secteur. Dans ces conditions, les repérages sont compliqués. Et une fois un coin trouvé, une autre réalité s’impose : Cajon Pass est une décharge d’ordure sauvage. Lave-vaisselle défoncé, pile de gravats ou restes d’un pique-nique bien arrosé sont autant d’exemples de ce que j’ai pu croiser. Et c’est sans compter le comportement sans gêne de certains « railfans » qui se sont posés tranquillement dans le champ de mon appareil photo.
Malgré un trafic conséquent, Cajon Pass me laisse une impression mitigée. Quelques belles séquences ensoleillées ont cependant permis d’adoucir le ressenti global.
Aux États-Unis comme en France, les parcs de locomotives ont été rationalisés. Autrement dit, on trouve toujours le même type de machines en tête des trains. Le côté positif de la chose est qu’une fois un cliché obtenu dans un endroit précis, on peut se déplacer et tenter un autre point de vue.
Pendant les quelques jours passés aux abords des voies, j’ai recherché les angles de vue que Steinheimer avait choisi. J’ai cherché, souvent, en vain, des traces… Son chemin de fer n’existe plus, nombre de secteurs sont aujourd’hui inaccessibles. Mais son regard et son rapport à l’adversité m’ont guidé. Contre-jour, des photos malgré une météo pourrie ou des cadrages inhabituels ont été une partie de mon quotidien. Vous pouvez maintenant le constater avec une sélection de photographies. Au moment d’écrire ces lignes, il est trop tôt pour dire si ce séjour américain aura été positif et déterminer ce qu’il m’a apporté.
Utilisation des clichés de cet article
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